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(RSV)
Le système de santé à l'épreuve de la transition

29 février 2024 est devenu une date tristement célèbre. À plus d'un titre. Pour le système de santé, ce fut une hécatombe.


Des centaines de polycliniques entre la rue Oswald Durand et la ruelle Berne sont fermées ou fonctionnent au ralenti, des dizaines de pharmacies pillées et incendiées, des laboratoires saccagés et des centres hospitaliers, dont l'Hôpital de l'Université d'État d'Haïti, vandalisés. À cette catastrophe sanitaire s'ajoutent les facultés des sciences de la santé qui, aujourd'hui encore, peinent à sortir de l'auberge. Ce tableau est l'héritage du Dr Ariel Henry et de son gouvernement. C'est aussi le lieu à partir duquel le Dr Garry Conille a promis de faire mieux.

"Et si je n’avais pas mon équipe de sécurité pour m’emmener à l’hôpital? Et si l’hôpital était fermé ? Et si arrivé à l’hôpital il n’y avait pas de médecins? Et si je n’avais pas les moyens pour acheter les médicaments ?", s'était questionné Garry Conille après une courte hospitalisation pour un malaise le 10 juin 2024. Et d'ajouter : "75% des infrastructures sanitaires du pays ne sont pas accessibles", avant de promettre de faire de la santé une priorité de son gouvernement. 

Durant son passage, M. Conille a visité, plutôt deux fois qu'une, des hôpitaux publics et privés, dont l'Hôpital général, mais les déclarations, avec force conviction, n'ont pas été performatives. Aucun centre public en Haïti n'est doté d'une salle de prise en charge des grands brûlés, même après sa visite à Miragoâne à la suite d'un incendie. Le département de l'Artibonite n'a pas un centre hospitalier de référence, l'hôpital La Providence des Gonaïves étant un éléphant blanc, et le drame de Pont Sondé n'a pas servi à renforcer l'hôpital Saint-Nicolas de Saint-Marc. Pour le système de santé, le Dr Garry Conille est parti comme il était venu, sans tambour ni trompette. 

Le MSPP, un ministère sans combat 

Par-delà le Dr Garry Conille, il y a le ministère de la Santé publique et de la Population qui n'est d'aucun combat, petit ou grand, depuis que la crise sociopolitique gagne le système de santé, entraînant la fermeture forcée d'une trentaine d'institutions sanitaires dans l'aire métropolitaine de Port-au-Prince.  Étant à la baguette, le Dr Georges Fils Brignol occupe le poste de ministre comme le premier qu'il occupe au ministère de la Santé publique et de la Population, secondé par le Dr Gabriel Timothée, qui n'en finit pas de revenir au sein dudit ministère.  La formation médicale, la réouverture des hôpitaux publics, le soutien des hôpitaux privés encore fonctionnels, la promotion de la santé, la sensibilisation à des maladies dont le risque de transmission augmente dans ce contexte de crise, la gestion du personnel par temps d'exode des professionnels de santé, etc., personne ne sait aujourd'hui quel problème le ministère de la Santé publique et de la Population a identifié et essaie de résoudre. La direction d'épidémiologie n'a toujours pas de directeur plus d'un an après la disparition du Dr Samson Marseille et le département du Centre n'a toujours pas de directeur pour remplacer le Dr Joseph Denis Jean Baptiste, décédé depuis le 1er juillet 2024.

En contrepartie des réunions se tiennent régulièrement au ministère entre la poire et le fromage et le ministre ne cesse de visiter les centres hospitaliers tandis que les résultats sont en panne d'éclosion. Dans la foulée, l'Hôpital universitaire de la Paix, le dernier centre hospitalo-universitaire public encore fonctionnel, est submergé par le nombre de patients en quête de soins de santé. Idem pour le centre hospitalier Eliazar Germain dont les lits sont presque saturés notamment par les femmes enceintes qui souhaitent accoucher en toute sécurité. La situation n'est pas différente dans le privé, selon le Dr Ronald Laroche. Preuve si besoin était que ça urge du côté de la santé;  les autorités sanitaires doivent se décarcasser pour faire mieux. Le système de santé est en train de sonner l'hallali de toutes ses forces, le nouveau Premier ministre, Alix Didier Fils-Aimé, pourra-t-il réussir là où deux médecins ont eu un bilan sinon insatisfaisant, au pire catastrophique?

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